lundi 6 septembre 2021

Le Moulin des Âmes du Purgatoire

"Le Moulin", emblématique de l'histoire de la Ville, celui qui servit d'assise au premier temple protestant de la Communauté en 1591.
On connaît la partie ancienne de son histoire par une transaction de février 1667, devant notaire, mettant fin à un procès devant le Sénéchal de Nîmes, entre le Syndic du Chapitre de la Cathédrale, demandeur de la restitution du moulin, et les Consuls de la Communauté, défendeurs.

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En novembre 1526, devant notaire, Mre Anthoine Rouveirolly, prêtre -apparemment fort riche-, fait donation de ce moulin à huile au "Bassin des Âmes du Purgatoire". Cet acte n'a pas encore été retrouvé, donc on ne sait pas encore quand ni comment le prêtre l'avait acquis.

Le "Bassin des Âmes du Purgatoire" est alors une œuvre pieuse -les militants prient pour que les âmes soient libérées du Purgatoire et passent au Ciel- gérée par des laïcs -souvent des conseillers consulaires dans les pays méridionaux en régime de consulat- ; il bénéficie de quêtes et de legs, ce qui en fait un "concurrent" des religieux et de leurs œuvres.

Au compoix diocésain de 1548, un article est ainsi libellé (en grande partie en occitan) : "Au Pont ... le Bassin de las Armos de Pecatory, un moulin d'huile avec deux piles (deux passages d'eau) et deux presses (deux meules) et tout autre garniment et puits, confronte du levant (est) Adorny Alies, couchant (ouest) et marin (sud) les carrieres, vent droit (nord) Anthoine Freton".
[Merci à mon mentor et ami Nicolas L., dénicheur émérite, pour ses conseils et critiques bienveillantes qui m'ont permis de trouver ainsi l'évolution depuis "les Âmes du Purgatoire" vers "les Armes"].

Victime collatérale des premières guerres de religion -dites guerres civiles dans la transaction- (1567-1589), le moulin est "entièrement ruiné et démoli sans pouvoir servir à aucune charge".

En 1590, les consuls décident de le remettre en état.
En août 1591, il passent marché, pour le prix de 35 écus (≈ 8 000 €), avec "un maître pour redresser le moulin à huile" ; les travaux sont achevés en octobre 1591.
On fait alors construire un puits pour l'alimenter en eau et le faire fonctionner ; pour ce, "on regardera d'où sera meilleur d'y faire venir l'eau, de la rivière ou du puits viel (ce qui est aujourd'hui la Font Vieille était déjà le Puits Vieil ...)" ; c'est la rivière qui sera finalement choisie.
Il sera dès lors appelé dans les délibérations consulaires "le moulin de la Ville".
Le moulin est ensuite arrenté (donné en location pour exploitation). Sur la demande de l'exploitant, en octobre 1592, on y construira une étable et on y installera une casadouyre (une cuve pour décanter le mélange eau - jus d'olive).

Au compoix dit de 1588 (compoix "commandé" en 1588 mais achevé probablement en 1592), il figure ainsi au compte de la Communauté : "un moulin à huile joignant le temple, confronte du levant Guillaume Portales, couchant et marin les carrieres, vent droit le temple, ..."

Le moulin poursuit ensuite "sa vie normale de moulin à huile". On trouve, çà et là, quelques réparations, habituelles dans la vie d'un moulin.
Et quelques références à son existence : pour exemple, un acte notarié de janvier 1596 concerne l'arrentement (la mise en location) par Jacques Jaumeton, maréchal-ferrant, à Thomas Vignedouze, cardeur, d'une maison "lieudit au Pont, confronte du levant avec la rivière de Caguelaure, du couchant avec un moulin appelé des Armes, d'aure avec les hoirs de monsieur Freton, du marin la rue du Pont".

Au compoix de 1664, on le retrouve mentionné au compte de la Communauté : "un molin à huile près le Pont, confronte du levant et aure (nord) Jean Jaumetton, couchant & marin les carrieres".
Suite à la transaction ci-dessus, il est transféré aux "Âmes du Purgatoire" en juin 1687. La gestion de l'Œuvre (et ses bénéfices...) avait entretemps été reprise par les religieux catholiques.
Bien plus tard, en juin 1762, il sera transféré au compte de Jean Jaumeton, maréchal-ferrant, habitant voisin, déjà propriétaire de la presque totalité de l'îlot d'immeubles : "un moulin à huile près le Pont faisant corps avec sa maison, confronte ... couchant et midi les carrieres."

Au cadastre Napoléon (1835), ce n'est plus qu'une maison "ordinaire", propriété d'un notaire de Bernis. C'est aujourd'hui un magasin de vêtements, au rez-de-chaussée d'un immeuble d'habitation.

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