Par un édit d’août 1692 (V° Gallica), Louis XIV, à la recherche de toujours plus d'argent pour financer ses guerres, transforme les fonctions assurées bénévolement par les consuls (ou par les syndics, échevins, jurats ou capitouls selon les lieux et provinces), tous élus, le plus souvent roturiers, suspectés de favoritisme dans l'édit, en "office", une "charge" que toute personne suffisamment riche ("ancien catholique" noble dans la plupart des cas) peut acheter, revendre et/ou transmettre à ses héritiers.
La création de ces "offices", divers autant que variés, mais tous vénaux et très profitables au trésor royal, sera amplifiée par son successeur, Louis XV. (😉"La plus belle prérogative des rois de France est que lorsque le roi crée une charge, Dieu crée à l’instant un sot pour l’acheter" •N. Desmarets, Marquis de Maillebois, Contrôleur général des Finances, ca.1718•)
Nos consuls, élus honorés et bénévoles, subsistent et continuent de gérer la Communauté °au quotidien° ; mais ils se retrouvent °chapeautés° par un maire °imposé°, coûteux pour les habitants, ayant souvent pour premier voire seul souci de rentabiliser son °investissement°.
Pour notre Ville, en 1706 (les registres des délibérations des années 1678 à 1705 sont absents) le "maire perpétuel" est M. Estienne de Bonafous, "conseiller du Roi, juge & viguier, & major-garde-côtes au district d'Aigues-Mortes". Bien que disposant d'une maison dans la Ville, il est très souvent absent des réunions du conseil de la Communauté, alors dénommé "politique", (il sera plus assidu quelques années plus tard ...) ; il est en ce cas °suppléé° par Jacques Therond, "procureur juridictionnel au Marquisat" (une autre °charge°, aussi vénale, de justice seigneuriale) et à son défaut par le Premier Consul en exercice.
Le conseil, composé en ce temps de 18 conseillers (il sera réduit plus tard) entourant 2 consuls (nombre maintenu), tous "catholiques", se réunit le plus souvent le dimanche après-midi, "dans la Maison de Ville, ... assemblé au son de la cloche et par le Valet de Ville ...".
Estienne de Bonafous meurt en octobre 1724 ; il est enterré dans l'église Saint-Saturnin (V° Brozer). °L'interim° est alors assuré par Mre Pierre Berlié, "docteur et avocat, bailli et juge au bailliage de Calvisson" (justice royale) ... qui sera élu Premier Consul au début de janvier 1725 ...
En novembre 1726 (V° Brozer), François Delard de Bonafous, écuyer, capitaine au Régiment de Limousin, fils du précédent, "partie [= famille/héritier] ayant été pourvue des offices de conseiller du Roi [et] maire ancien alternatif et triennal de Calvisson créé en décembre 1706, ... dont il a payé la finance, [est] reçu audit office [et] installé par les consuls avec les honneurs accoutumés".
D'abord très assidu aux conseils, il sera ensuite absent de plus en plus souvent. Son nom disparaît des comptes-rendus du conseil après août 1732.
Les conseils suivants sont assemblés "devant M. Charles Moynier, viguier et Premier Consul", qui sera en fevrier 1735 "reçu en la charge de Premier Consul ancien mitriennal [sic = Premier Consul perpétuel] dont il a payé la finance, ... aux gages de trente livres par an (≈ 550 €) [à la charge de la Ville]" ; puis il acquerra fin 1735 l'office de "Lieutenant de Maire". Son fils, André Moynier, lui succédera dans ces offices en octobre 1759, après en avoir "payé la finance" (300 livres [≈ 5 500 €] en principal plus 30 livres par an).
À défaut de ce dernier, les conseils sont assemblés en 1733/1734 "devant M. Jean Jaumeton, procureur juridictionnel et Premier Consul".
La mention "M. de Bonafous" (toujours absent) °réapparaît° en juin 1734 ; puis il est souvent présent de décembre 1734 à fin 1736. Le dernier conseil qui le mentionne, "en absence", est de juillet 1737.
François de Bonafous décède peu après, °dans les casernes du Roi° (mention dans le titre de provision nommant son successeur). °L'interim° est assuré par Charles Moynier, "lieutenant de maire en titre et Premier Consul perpétuel".
En avril 1740, Jacques Therond, beau-frère du précédent maire et gendre (et ex-suppléant) du premier, est reçu dans ces offices, après en avoir payé la finance (600 livres [≈ 11 000 €] en principal plus 60 livres par an). Il présidera activement toutes les réunions du conseil jusqu'en décembre 1765. Il semble qu'il soit décédé en mars 1766.
°L'interim° est alors assuré par M. Pierre-Jacques de Fabrique, "avocat et bailli au bailliage et Marquizat de Calvisson" ... qui négligera parfois de se rendre au Conseil. Il sera en ce cas remplacé par le Premier consul élu en exercice.
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Par édit de mai 1766 (éxécuté à Calvisson en janvier 1768 ...), Louis XV supprime les offices municipaux dans les villes du Languedoc (et rembourse les seuls titulaires °privés° ...). Les conseils, toujours "politiques", et leurs consuls élus retrouvent leurs entiers pouvoirs et libertés, sous réserve d'inviter les officiers seigneuriaux (bailli et procureur fiscal) aux réunions.
Là commence une autre histoire, agitée ...