Actualisé en novembre 2024
Pendant les 15ème et 16ème siécles, c'est avéré pour notre paroisse (V° Monographies Paroissiales, par l'Abbé Goiffon - 1893 - p. 319), il y avait un prieur (par ailleurs chanoine-vestiaire de la Cathédrale de Nîmes)) attaché à l'église Saint-Saturnin ; un prieur, titulaire donc du bénéfice d'un prieuré. Mais je n'ai pas trouvé trace d'un bâtiment qui aurait abrité l'un ni l'autre.
Selon les *Historiens Anciens de Calvisson*, il aurait existé en outre, du 11ème au 15ème siècle, "un couvent avec cloître", bâtiments quasiment accolés à cette église Saint-Saturnin. Mais ...
Aux compoix, tant diocésain de 1548 que consulaires de 1588 et 1664, on ne trouve aucune mention de "pièces" (les "parcelles" dans les cadastres modernes) qui auraient confronté un couvent ; on trouve seulement certaines pièces confrontant "le temple" (l'église), d'autres confrontant "le cimetière" et d'autres encore "la dominicature" (terre appartenant au seigneur du lieu ou à l'Église).
Et les visites épiscopales de 1674 (J.-J. Séguier) et de 1694 (E. Fléchier) ne font aucune mention de bâtiments ni de religieux ayant pu ni pouvant appartenir à un "couvent".
Alors ... une légende (parmi d'autres ...) ?
L'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) a mené en mars 2017 un diagnostic archéologique dans l'espace libre entre les restaurants et l'église, en liaison avec les fissures du mur septentrional de l'église. Sa conclusion est nette : "Aucune structure archéologique n’est attribuable au Moyen Âge médian ni au bas Moyen Âge" (donc les périodes du 11ème au 15ème siècle).
En novembre 2024, mon ami François de Fabrique (d'une "vieille" famille calvissonnaise : dès avant 1590, le notaire royal Bartolomy de Fabrica accueille dans son moulin de l'Herboux les prêches du "ministre de la parole", avant la construction du premier temple, et Pierre de Fabrique sera Consul en 1634) m'a transmis un "État des biens nobles et autres pensions comprises dans la Communauté et taillable de Calvisson" (Archives départementales du Gard - C795) établi par le notaire Antoine Petras en juin 1711, "sur l'indication" des arpenteurs commis pour l'imposition du "Dizième" noble.
Le Chapitre de Nîmes y est mentionné pour 3 articles, entre autres, qui concernent directement notre sujet, ici transcrits en langue et graphie d'aujourd'hui :
- une maison et écurie proche l'église, confrontant du levant le chemin qui va à Bizac, du couchant l'ancien cimetière, d'aure le Rampan, chemin entre deux, et du marin le vacant du puits à roue et une terre dudit Chapitre, contient de couvert treize destres (≈ 208 m²) et de passage ou porche un destre et demi (≈ 24 m²)...
- un vacant où il y a un puits à roue joignant la susdite maison, confronte du levant soi-même, du couchant l'ancien cimetière, d'aure la susdite maison et du marin l'église, contenant trente six destres (≈ 576 m²)...
- une terre joignant, confronte du levant le susdit chemin de Bizac, couchant l'église et le susdit vacant, d'aure l'écurie de ladite maison et du marin le nouveau cimetière, contient soixante deux destres (≈ 992 m²)...
→ Les confronts (les superficies sont surprenantes au regard des actuelles ou de celles du cadastre Napoléon, mais en 1711, qui sait ?...) permettent de reconnaître sans hésitation le bâtiment abritant aujourd'hui les restaurants, l'espace libre °terrasses→passage des Encoules/église° et les bâtiments (boutique et habitations) situés entre l'église et la route de la Cave.
Ainsi donc, visiblement, "une maison et écurie" ... et pas °un couvent° ... légendaire ...
On trouve la première mention du mot "couvent" dans l'article 18 d'un "bail de plusieurs travaux" passé par la communaauté en septembre 1760 (V° Brozer) : "[faire] un empierrement depuis ... le parvis [de l'église] jusqu'au coin du couvent ... du côté du nord".
Puis, en septembre 1790, le "Conseil général de la Commune" décide, pour remplacer l'immeuble de caserne de la rue de la Tranchée, "susceptible de réparations très considérables et mal situé, [de] faire l'acquisition d'une maison, appelée le Couvent, qui a servi jusqu'à ce jour à l'entrepôt de la dîme, ... également l'aire et le terrain attenant [qui] serait à l'usage de la Commune pour fouler et battre le grain, ... à servir de promenade publique et à exercer la Garde Nationale, ... que cette maison dite le Couvent appartenant ci-devant au Chapitre de Nîmes ...".
La commune, représentée par son maire André Renouard, achètera le 15 décembre 1791, comme "bien national de première origine" (bien du clergé), cette maison appelée "le couvent", mesurant environ 50 dextres (≈ 800 m²), l'aire et la terre y attachées, mesurant 166 dextres (≈ 2 656 m² - des superficies là encore surprenantes), le tout pour 7 575 livres (≈ 125 500 €) - [V° L'aliénation des biens nationaux dans le Gard, par François Rouvière - 1900 - p. 154].
Ces biens seront "arrentés" (= donnés en location) *à la découpe* le 14 octobre 1792, à 6 occupants différents, tous de Calvisson, pour un total de 190 livres (≈ 3 300 €) par an.
Puis le 22 septembre 1794, les 6 "cuves"(1) présentes dans le bâtiment seront vendues à des citoyens de Calvisson pour un prix total de 884 livres (≈ 15 000 €) en assignats, mandats et quittances.
(1) Les cuves contenaient au total 146 muids ; mais difficile, voire impossible, de convertir en mesures d'aujourd'hui : le muid était de valeur différente selon le contenu, liquide (vin, ou huile) ou solide (blé, ou avoine, ou autre que des grains).
La commune sera contrainte par "le Directoire du District" de revendre la maison ; après enchères, elle sera adjugée le 6 septembre 1795 (20 fructidor An III) à Jean Penot, pour la somme de ... 224 000 livres (≈ 3 700 000 € - ibid. - p. 302).
Jean Penot époux Domergue (le même ? le fils du précédent ?) est propriétaire de l'immeuble au cadastre Napoléon (1840). Au début du 20è siècle, cet immeuble abrite la brigade de Gendarmerie.
Plus tard, de nouveau propriété de la commune, il sera le siège de la Police municipale au rez-de-chaussée ... et d'une antenne de centre médico-social au 1er étage.
Aujourd'hui, il abrite deux restaurants (revitalisation du centre-ville) et des salles municipales.
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